Le Faix du Diable
Le Faix du Diable
Saint Remacle venait de bâtir son monastère de Stavelot quand un ange vint lui apprendre qu’un danger le menaçait : Satan, irrité par les succès de l’apôtre et prévoyant que le nouvel établissement lui causerait des difficultés, avait résolu de mettre fin à cela.
Il venait, chargé d’un morceau de grés, pour le laisser tomber sur l’église, au moment où Remacle et ses frères seraient pieusement occupés à chanter les louanges du Seigneur.
Le Saint comprit qu’il n’avait pas de temps à perdre et, ramassant toutes les vieilles sandales qu’il put trouver dans les cellules, il emplit un « bot » (hotte), en chargea l’un de ses moines, puis il donna ses instructions à ce dernier et lui indiqua le chemin qu’il avait à suivre.
Arrivé à quelques lieues de Stavelot, le rusé messager rencontra Satan, sa montagne de grés sur le dos, le mauvais venait précisément de gravir une côte escarpée qui a conservé son nom : le Thier du Diable.
Son visage ruisselait de sueur, et ses narines soufflaient comme une soupape de locomotive. Dès qu’il aperçut le moine qui marchait vers lui et feignait une fatigue extrême, il lui demanda s’il était encore fort éloigné de Stavelot.
L’autre, joignant son geste à la parole, vida son « bot » sur le chemin en lui montrant son tas de savates :
- «Jugez-en vous-même » dit-il, « tout cela était neuf quand je suis parti ».
A ces mots, Satan, qui trouvait déjà la marche assez longue, lâcha un énorme juron et secouant son paquet, il l’envoya à touts les diables ainsi que Saint Remacle.